Mademoiselle Maurice |
Libérer l’éducation : libérons-la
de tout ce qui l’enferme, la sclérose ou la gangrène : c’est à dire tout ce
qui relève du pouvoir et du contrôle. En réalité, la liberté est indispensable
à l’homme, elle est même sans aucun doute sa raison d’être.
Notre éducation actuelle est en
faillite ; elle est structurée par un système de conditionnement, d’aliénation,
qui assoit et légitime le pouvoir des uns sur les autres, et qui appuie les
inégalités. Qui perpétue la violence sous toutes ses formes, la banalisant à
tel point que nous ne sommes plus capables de la voir. Des valeurs qui sont des
anti-valeurs, qui favorisent l’indifférence à la solidarité, la peur à la
bienveillance, le jugement à la compréhension, la violence à la non-violence. A
travers l’éducation, nous transmettons nos propres limites et peurs, encore et
encore.
Nous prenons nos enfants en
otage, nous nous substituons à leur libre arbitre, nous nous ingérons dans leur
rapport à eux-mêmes. Nous leur signifions qu’ils n’ont pas le droit d’être
eux-mêmes, que ce n’est pas une bonne chose, qu’ils doivent culpabiliser, et
que s’ils veulent mériter notre amour, ils doivent sans cesse obéir et faire
mieux. Nous faisons d’eux des personnes dépendantes, fragiles, influençables,
qui n’ont plus confiance en eux (ni en nous) et aucune estime de leur personne.
En fait, nous leurs apprenons à être des esclaves qui n’ont pas conscience
d’être des esclaves.
C’est à force de nier leur droit
à la liberté d’être soi que des jeunes désespérés sont récupérés par des
mouvement extrémistes, y trouvant un sens à la vie et une raison de vivre (ou
de mourir), pour avoir enfin le droit d’exister.
C’est la faillite de tout un
système éducatif, mais aussi de notre société. Une crise, à la fois sociétale,
économique, environnementale, politique. Une polycrise, comme le dit Edgar
Morin. Et le seul facteur commun à ces crises est le facteur humain. Nous ne
pouvons plus continuer de la sorte. Mais une crise révèle toujours une
opportunité : nous avons enfin l’opportunité de changer ; pas
seulement de réformer tel ou tel domaine, mais de recréer, de transformer, de
(nous) métamorphoser. Autrement dit, nous devons hacker notre éducation. Les
pédagogies nouvelles ont déjà entrouvert les portes de la liberté, mais bien
souvent, elles ont été récupérées pour devenir des idéologies ou des dogmes.
Nous avons un grand travail à
accomplir : une profonde remise en question et une déconstruction de nos
pensées, de nos comportements et habitudes. L’éducation a ici un rôle crucial à
jouer, elle est un puissant levier d’action et d’émancipation, elle a le
pouvoir de changer le monde. Mais il ne s’agit pas de faire peser sur les
épaules de nos enfants le fardeau du monde ou de nos attentes – et par là de
nous déresponsabiliser encore. La première forme d’éducation commence par nous-mêmes,
dès aujourd’hui. Il nous faut aller à la rencontre nous mêmes, exprimer notre vérité, notre authenticité.
Les enfants n’ont pas besoin
qu’on leur dise qui ils doivent être, ce qu’ils doivent penser ou faire. Par
contre, ils ont besoin d’être accompagnés de manière respectueuse et
bienveillante, libre et responsable. Avec bon sens et empathie, et un regard
positif inconditionnel. Il n’est pas question non plus de laxisme ou
d’anarchie. Au contraire, c’est un travail exigeant : accompagner les
enfants dans leur découverte du sens de leur liberté et de leur responsabilité.
Alors, les punitions sont obsolètes. Et à un niveau évolué de ces pratiques,
nous n’aurions plus besoin de prisons.
Par l’éducation, ou plutôt
l’auto-éducation, il s’agit donc de libérer l’être humain. Et avec lui, les
talents, les potentiels, les dons, la créativité, les passions, les
compétences,… Libérer les rêves. Il est temps d’accepter, d’accueillir les
différences : le droit pour chacun d’être et de devenir qui il est, de
s’épanouir dans son humanité profonde, car notre monde a besoin de nos différences.
Notre société a besoin de toutes les intelligences, de toutes les imaginations
possibles. Elle a besoin de citoyens engagés dans le vivre ensemble et
l’organisation de la cité.
Rendons leur liberté à nos
enfants.
un très beau texte que j'approuve sans conditions ! merci pour ce partage, cela fait un bien fou !
RépondreSupprimerbonjour
RépondreSupprimerexcellent article mais parfois je reste septique car lorsque l'on parle de libérer l’être humain et d'accepter les différences , cela hélas n'est pas toujours vrai car des enfants de confession musulmane souffre de ce rejet , car sont musulmans alors qu'ils ne demandent qu'a vivre en paix avec tous ,sur des principes et valeurs humaines et en respectant chacun avec ou sans croyance . Ils entendant chaque jour qu'ils ne sont pas comme les autres, qu'ils ne sont pas aimés , la société fait d'eux des parias alors qu'ils ne demandent rien, juste être humain et s'aimer , est-ce possible ? ou juste un rêve et une théorie ?
Bravo, super article qui représente tout ce que je ressent au plus profond de moi et ce que je m'emploi a faire vivre dans ma famille. Accompagner mes 5 enfants en les invitant à se connecter à leur propre sagesse, ne pas intervenir dans leurs choix, et les laisser être pleinement qui ils sont. Comme tu le dis le vrai travail n'est pas sur eux, mais bien sur nous. Il nous faut lâcher de vieilles croyances et oser suivre notre coeur....
RépondreSupprimerBonjour: effectivement les "bons" élèves s'ennuient, comme les plus faibles ! Le drame est là ....
RépondreSupprimerBonjour!
RépondreSupprimerJoliment écrit. Je me suis souffert de ce système scolaire. Un système qui m'a laissé avec un complexe d'infériorité. Mais en faisant d'autres cours à suivre autres façons d'enseigner, il se développe lentement. Je me donne maintenant leçon de Arhanta ashrams et même si je lutte encore avec ce morceau, il vaut mieux chaque jour.
Cordialement,
Amalia
C'est le cheminement que nous avons dû faire pour éduquer notre fille aînée, autiste d'Asperger aux potentialités nombreuses. Une éducation structurée inspirée des méthodes Teacch et Montessori (les 2 sont proches) qui libère l'individu pour exprimer sa personnalité. Malheureusement, la société n'est pas prête et je le vois aussi pour ma cadette EIP qui a du mal à trouver sa place à l'école.
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