Au début de mon voyage dans le
monde de l’éducation, avant de devenir maman, je m’interrogeais quant à la
meilleure pédagogie pour élever un enfant. Après avoir étudié nombre de
courants éducatifs connus et moins connus, en passant bien entendu par l’option
éducation nationale, je me suis ensuite familiarisée avec l’instruction en
famille, et enfin, la non-scolarisation ou unschooling
en anglais.
Au départ, bien sûr, lorsque l’on
choisit un courant pédagogique, il y a sans doute intervention de facteurs
personnels, voire émotionnels. Tel parent sera plus sensible à la pédagogie
Montessori qui lui semble logique et concrète, tel autre plutôt à du
Steiner-Waldorf pour l’aspect créatif et artistique voire spirituel, ou encore
à du Freinet pour l’aspect collectif et collaboratif, etc.
Il y a aussi la volonté de bien
faire ; le parent va se former du mieux qu’il peut à la pédagogie choisie,
et peut-être, comme c’est souvent le cas, mêler les apports d’autres pédagogies.
Mais comme nous le savons, la
réalité n’est pas si simple, et si le fait de s’accrocher à une pédagogie peut
être rassurant, nous en percevons bien vite les limites. Les pédagogies
nouvelles commencent à dater ; les enfants d’aujourd’hui ne sont plus les
mêmes, ni physiologiquement, ni psychologiquement. Et le monde dans lequel nous
vivons a changé, tout comme ses enjeux, ses défis. Il est donc impossible de
« plaquer » une pédagogie sur un enfant, et plus encore sur un groupe
d’enfants. Nombre de parents auront eu l’intelligence de s’en rendre
compte, et de lâcher du lest pour permettre à l’enfant d’être plus acteur de
ses choix éducatifs.
Aujourd’hui, je suis persuadée
qu’une éducation réelle doit faire le chemin inverse. Observer et écouter un
enfant – chaque enfant – et lui laisser la plus grande amplitude possible.
L’adulte est alors un accompagnant, qui se limite à répondre à une demande
exprimée par l’enfant. Il s’agit d’un renversement total, d’un virage à
180° ; et si en théorie nous sommes nombreux à avoir cerner sa nécessité
et à tenter de l’appliquer tant bien que mal, nous percevons vite nos propres
limites d’êtres conditionnés par une éducation autre. Les vieux
réflexes resurgissent toujours, à un moment ou à un autre, dans un comportement
ou encore une phrase, dont nous sentons de suite qu’elle n’est pas
« juste » ; mais elle est présente, et nous invite alors à nous
penchons sur l’enfant que nous avons été, auquel on a refusé cette part de
liberté.
J’en suis arrivée à m’intéresser
au courant du unschooling. Et là, les choses m’ont semblées limpides :
après tout, vivre, c’est apprendre. Et nous apprenons tout au long de la vie,
par nous-mêmes. En observant un enfant, nous voyons clairement que l’apprentissage
de ses connaissances ou de ses compétences ne dépend pas de nous. Et que c’est
à la condition d’avoir été pleinement acteur de ces acquisitions qu’elles se
révèlent durables. Un enfant, poussé par sa curiosité et son enthousiasme, peut
tout apprendre. Je dis bien tout apprendre. S’il a besoin d’aide, il
l’exprimera. Mais le laisser suivre le fil de ses passions est, me semble t’il,
la façon la plus saine et la plus intelligente d’envisager l’éducation. De
cette façon, l’enfant ne subit aucun conditionnement, aucun échec, aucune compétition,
aucun enjeu, si ce n’est celui d’apprendre, pour le plaisir d’apprendre et de
mettre en pratique. Alors, il y mettra tout son cœur et tout son sérieux.
L’éducation, qui est synonyme de vivre, revient alors à apprendre joyeusement,
passionnément, pour toute la vie, s’adaptant, et servant à révéler les
merveilles dont chaque enfant, dans son unicité, est porteur.
Pourquoi notre enfant devrait-il
nous croire sur parole, obéir à un programme prédéfini qui ne l’intéresse pas,
rentrer dans le moule et la compétition ? Nous ne savons pertinemment,
tout cela, et même avec les meilleures intentions du monde, ne va servir qu’à
freiner sa quête, éteindre sa curiosité, et finalement bloquer un processus
naturel.
Pourtant, nous avons tous des
automatismes, soyons-en conscients. Mais nos enfants ne sont pas nos choses.
Profondément, ils sont la manifestation de la Vie et de l’Amour, ils ne nous
appartiennent pas, nous ne sommes que leur protecteur temporaire. Et sur un
autre plan, ce sont souvent eux qui se révèlent être nos plus grands guides
dans la vie. Ils nous amènent, avec beaucoup d’amour, à donner le meilleur de
nous-mêmes. Parce que c’est ce que nous souhaitons leur offrir. Et à cet
instant, ils nous font comprendre que ce cadeau ne leur était pas destiné, mais
que c’était le notre.
La réponse à tous ces questionnements
réside dans la confiance. Lorsque j’ai confiance en mon enfant, je lui offre la
possibilité d’une part de vivre ses expériences, et d’autre part de gagner en
confiance en lui. Habitué à vivre une certaine liberté, il sait que celle-ci
signifie aussi responsabilité. Ecouté et respecté, il n’aura pas besoin a
priori de tester nos limites (ou les siennes).
Si je fais confiance à mon
enfant, j’apprends aussi à me faire confiance, et à avoir confiance en ma
sagesse de parent. Bien sûr, il est normal d’avoir peur, d’être inquiet pour
son enfant, mais il faut combler ces inquiétudes par de la confiance.
Et de la joie aussi : joie
de vivre, joie d’expérimenter cette vie, joie d’apprendre, joie de créer une
relation saine et authentique.