Accompagner dans la compréhension
Face aux événements de ces
derniers jours, comment aborder la violence avec ses enfants ?
Pour les tout petits, il sera
préférable de les protéger au maximum de ces événements et de ne pas les
exposer aux images des écrans. Ils n’ont pas la possibilité de traiter
rationnellement ces informations, et cela peut engendrer un traumatisme. Mais
s’ils posent des questions, il sera préférable et plus sain d’en parler plutôt que
d’en faire un sujet tabou – à partir duquel l’enfant pourrait fantasmer et
imaginer tout et n’importe quoi.
Pour les plus grands, qui auront
accès d’une manière ou d’une autre à des informations, expliquer clairement et
simplement les événements, et insister également sur leur caractère
exceptionnel.
Il ne suffira pas de raconter les
événements, ils voudront comprendre, donner du sens à ceux-ci, et poseront des
questions, auxquelles il faudra répondre avec grande attention. Et là, le
danger serait de donner dans une version manichéenne de la situation - il
y a des gentils et des méchants - ou de stigmatiser les représentants d’une
religion, etc. Prenons garde à l’instrumentalisation de la situation par des
médias ou des politiques.
Prenons le temps d’expliquer que
personne ne nait violent, mais que bien souvent, les personnes qui commettent
de tels actes ont manqué d’amour, de reconnaissance, de tendresse. Ce sont des
personnes blessées, qui n’ont trouvé une raison d’exister qu’à travers la
violence. Il sera aussi évident de condamner fermement la violence : en
aucun cas elle n’est acceptable, en aucun cas elle ne peut être une réponse.
Notre rôle de parent n’est pas de
préparer nos enfants à la violence de ce monde, mais bien au contraire, de leur
permettre de vivre leurs émotions, de les accompagner dans l’autonomie afin
qu’ils soient des adultes épanouis et heureux, qui changeront le monde.
Accompagner dans les émotions
Comme le disait François
Héritier, la confiance et la sécurité font partie des besoins vitaux de l’homme ;
ces besoins sont ébranlés, lorsque nous prenons conscience que la violence et
le mal existent, et pourraient se reproduire plus près encore de chez nous, ou
même au sein de notre foyer.
Alors, l’écoute et le dialogue sont
primordiaux : un enfant insécurisé aura sans doute besoin d’en parler à de
nombreuses reprises, il posera des questions. Il aura besoin d’être rassuré,
câliné. Soyons attentifs à cela durant quelques temps.
Gardons aussi à l’esprit que de
toute évidence, même protégés, les enfants seront sensibles au climat
d’insécurité, de tristesse, de peur. Il est possible dès lors qu’ils se
déchargent à partir de petits événements paraissant insignifiants de prime
abord.
Il ne s’agit en aucun cas, sous
le choc de nos propres émotions, de leur transmettre nos peurs – un travail sur
celles-ci sera d’abord nécessaire, avant d’aborder la situation. Cela ne
signifie pas qu’il ne faut pas montrer ses émotions, mais de manière
responsable et saine.
Accompagner dans une éducation à la paix
Ces événements violents, qu’ils
soient ici ou ailleurs, sont toujours un rappel de l’importance de semer des graines
de paix dans l’éducation : que celle-ci ne soit pas un vœu pieux, mais une
réalité concrète. L’éducation doit semer, préparer, toujours nourrir la paix.
L’éducation doit rassembler dans un vivre-ensemble.
« Aborder le sujet de l’éducation pour la paix à un moment aussi critique
que celui-ci, où la société est sous une permanente menace de guerre, peut
paraître témoigner de l’idéalisme le plus naïf. Je crois pourtant que poser les
fondements de la paix pour l’éducation est la façon la plus efficace et la plus
constructive de s’opposer à la guerre. »
Maria Montessori
Et comme toujours, ce travail de
longue haleine commence par nous-mêmes : accueillons nos propres émotions
de colère et de peur, et choisissons la confiance et la paix. Lorsque nous
sommes confrontés à de telles situations, je pense que nous avons une part de
responsabilité (et non de culpabilité) : soyons solidaires, de toutes les
victimes – ce qui inclut absolument tout le monde, et pas seulement ceux que
nous appelons victimes au sens premier du terme. Sans leur dénier la
responsabilité de leurs actes criminels, les tueurs sont également victimes de
leurs choix et de leur violence.
La situation peut sembler
pessimiste, mais en favorisant une éthique de la responsabilité, chacun peut
se sentir investi d’un rôle à jouer dans la prévention de la violence.
La vie est précieuse...
"Je ne vois pas d'autre issue : que chacun de nous fasse un retour sur
lui-même et extirpe et anéantisse en lui tout ce qu'il croit devoir anéantir
chez les autres. Et soyons bien convaincus que le moindre atome de haine que
nous ajoutons à ce monde nous le rend plus inhospitalier qu'il n'est déjà."
Etty Hillesum