L’empathie est la capacité que
nous avons à nous mettre à la place de quelqu’un et à comprendre ce qu’il ressent. C’est une qualité précieuse,
qui permet de développer des aptitudes sociales, que ce soit en famille ou en
société. Elle favoriserait une culture de la paix et de la non-violence ;
à ce titre, elle doit donc pleinement être intégrée au cœur de l’éducation
bienveillante. Il semble que l’empathie soit liée à plusieurs éléments, tels
que le respect, les émotions, le vivre ensemble, la solidarité, etc.
Récemment, les neurosciences se
sont également penchées sur l’empathie, révélant l’existence de systèmes
cérébraux spécifiques, neurones « miroir » ou « résonnant ».
Elle est, semble t’il, un besoin fondamental de tout être humain – et pourtant,
elle est souvent oubliée dans notre culture, ignorée par l’éducation, qui a
privilégié et survalorisé le mental et l’intellect.
A partir de quel âge l’empathie
se manifeste t’elle chez l’enfant ?
Elle apparait naturellement chez
le tout-petit, elle est en fait inhérente à l’humanité. Selon Serge Tisseron,
l’empathie se développe réellement chez le petit enfant entre l’âge de 8 et 12
mois. Elle est alors avant tout émotionnelle : l’enfant ressent les
émotions de l’autre. Il comprend les émotions et désire aussi venir en aide. Vers
ses 4 ans et demi, apparait l’empathie cognitive, l’enfant est alors capable de
se représenter l’état mental de l’autre.
- Empathie, approche centrée sur la personne, CNV
Si le psychologue Carl Rogers a
mis l’empathie au cœur de sa théorie de l’approche centrée sur la personne,
celle-ci est également le moteur de la CNV (communication non violente). Nous
évoquions la possibilité de l’écoute active ci-dessus, et il est également
important de « parler juste » : comment vais-je exprimer mes
émotions ? Je reçois, par l’écoute, et je donne, par l’expression –
j’accueille - et tout cela sans jugement : toute émotion est légitime. La
colère ou la peur par exemple, comme toute émotion, comme tout état, est non
seulement légitime, mais aussi momentanément utile, nécessaire, voire
salutaire. L’émotion est l’état qui me permet de répondre à une
situation ; l’état émotionnel est le moment de décharge, de libération –
nécessaire de cette (sur)charge émotionnelle.
- Auto-empathie
Comment pourrais-je respecter les
autres et leurs émotions, si je ne me respecte pas moi-même ? Comment
pourrais-je vivre en bonne intelligence avec les autres si je n’assume pas mes
besoins émotionnels ? La première partie de ce cheminement est consacrée à
la relation que l’individu entretient avec lui-même : il s’agit de
l’auto-empathie. Apprendre à reconnaître, comprendre et gérer mes émotions et
mes besoins – être en lien avec moi-même – et ainsi être conscient de ce que je
ressens et expérimente (plutôt que de rester inconscient ou vaguement conscient
et de se laisser maîtriser par des processus qui nous échappent, ne nous
appartiennent pas forcément et qui ne sont dès lors pas choisis, mais subis). Par
ailleurs, et c’est notre thème de recherche via une éducation joyeuse : la
joie doit toujours être notre boussole.
- Empathie et culture émotionnelle
Il est important d’encourager une
culture de l’intelligence émotionnelle, avec moi-même, en tant que parent, mais
aussi avec mes enfants. Je peux d’abord faire ce travail personnellement ;
être clair quant à mes émotions et mes besoins, exprimer mes demandes, et poser
des questions à mes enfants : « comment
te sens-tu ? » est un début. J’écoute activement : ainsi, je
suis relié à moi-même et aux autres, dans le moment présent. Il est tout à fait
envisageable de pratiquer cette « hygiène de vie » émotionnelle au
quotidien, tout comme nous prenons la peine de nous brosser les dents le soir.
Michel Claeys Bouuaert, qui a
consacré plusieurs ouvrages à l’éducation émotionnelle (Ed. Le souffle d’or)
propose par ailleurs sur son site un guide pratique pour éducateurs et
enseignants comprenant des exercices à mettre en pratique avec les plus jeunes[1].
L’empathie est à mon sens
fortement liée à cette activité et valorisation de l’intelligence du cœur. Elle
relève d’un savoir-être, c’est à dire d’une qualité d’être en processus qui se
« travaille » tout au long de la vie. Et parce que nous ne vivons pas
(encore) dans une culture de la paix et de la non-violence, il nous faudra sans
doute faire un cheminement pour nous défaire de nos conditionnements non-bienveillants,
voire violents.
Je précise qu’il ne s’agit pas
non plus d’aller vers un autre extrême ; nous ne devons pas quitter la
condition de bourreau pour celle de la victime (ou l’inverse) ; de toute
évidence, ces deux polarités étant immanquablement liées, nous allons
généralement de l’une à l’autre, comme s’il s’agissait des deux faces d’une même
pièce. Il s’agit au contraire de quitter ces états et d’adopter une posture de
responsabilité.
L’empathie ne signifie pas non
plus prendre la responsabilité des émotions ou des besoins de l’autre :
elle se met à l’écoute, mais ne se substitue pas ; elle accompagne, sans
intrusion, et laisse l’autre libre de lui-même, et donc pleinement responsable.
Là réside le respect : de soi et de l’autre, et donc l’empathie.
- Empathie et responsabilisation
Concrètement, il apparaît
clairement que nos enfants ont tendance à reproduire nos propres schémas non
résolus. La manière la plus pertinente d’encourager l’empathie chez un enfant
est de la pratiquer soi-même et avec eux, au quotidien – car nous savons qu’un
discours, même répété, ne laisse que peu de traces. Par ailleurs, nous pouvons
encourager et nourrir des valeurs positives à travers des lectures inspirantes
par exemple (voir ci-dessous).
Il est vraisemblable qu’une
éducation bienveillante et consciente (parentage) encourage tout naturellement
l’empathie et l’intelligence émotionnelle des enfants. A l’inverse, ce sont au
contraire les blessures d’enfance qui engendrent manque d’empathie,
narcissisme, fausses croyances limitantes et autres conséquences : si je ne suis pas guéri d’un manque ou
d’une souffrance que j’ai vécus, je chercherai à le combler d’une manière ou
d’une autre, tout au long de mon existence. La vie et ses expériences sont une
constante invitation à guérir, apprendre, grandir en conscience ; s'éduquer, c'est se libérer et se responsabiliser.
- Lectures conseillées
Lectures pour les parents :
Michel Claeys Bouuaert, Pratique de l'éducation émotionnelle : Une
approche ludique, 2004, Ed. Le Souffle d'Or
Jean-Philippe Faure, Céline
Girardet, L’empathie, le pouvoir de
l’accueil, 2003, Ed. Jouvence
Jean-Philippe Faure, Eduquer sans punitions ni récompenses,
2005, Ed. Jouvence
Isabelle Filliozat, Au coeur des émotions de l'enfant,
2013, Ed. Marabout
- Que se passe t-il en moi ? 2013, Ed. Marabout
Lecture pour les enfants :
Julie Belaval, Carla Manea
(illustrations), Le temps des émotions,
2013, Ed. Rue des enfants, à partir de 4 ans.
Gilles Diederichs, Gestion des émotions - 35 activités pour
aider votre enfant à mieux vivre les émotions, 2014, Ed. MANGO
Dharmachari Nagaraja, Histoires d'ailleurs : Petits contes de
sagesse bouddhiste pour aider votre enfant à vivre dans l'harmonie, 2014,
Ed. Le Courrier du Livre
Michel Piquemal, Philippe
Lagautrière, Les philo-fables pour vivre
ensemble, 2009, Ed. Albin Michel Jeunesse
David Sander, Sophie Schwartz et
Clotilde Perrin (illustrations), Au coeur
des émotions, 2010, Ed. le Pommier
[1]
PDF disponible à l’adresse suivante, exercice d’empathie p .71 : http://www.education-emotionnelle.com/wp-content/uploads/2012/08/education-emotionnelle-jeunes.pdf
La lecture de votre article m'a apaisée !
RépondreSupprimerJ'adhère totalement à cette approche de la vie par l'écoute et la prise en compte des émotions.
Faire grandir nos enfants sur ce modèle promet, à mon sens, un avenir très coloré