lundi 24 novembre 2014

« Garder le fil de la merveille »

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« Garder le fil de la merveille » écrivait Christiane Singer.
Les enfants, non encore initiés à la lassitude du monde et de l’éducation, s’émerveillent sans cesse. Tout, dans le quotidien, est prétexte à s’étonner et se réjouir.

En fait, l’émerveillement échappe aux savoirs, aux connaissances, mais il peut aussi les porter, et se faire le moteur enthousiaste de la découverte du monde et de la vie. L’éducation devrait être une suite incessante de découvertes et de surprises, tout au long de la vie ; et dès lors, l’émerveillement serait la clé de voûte de tout apprentissage, en révélant le sens profond.

Une éducation émerveillée signifie pour le parent la capacité à s’« élever » - sens premier d’ « éduquer » - souvent au prix d’un travail de conscience important. Il sera nécessaire de laisser les attentes et demandes – mais aussi les peurs et les culpabilités - que nous projetons sur nos enfants, pour aller à la rencontre de l’enfant, tel qu’il est, et voir qu’il est une merveille. Oui, cet enfant, tel qu’il est, est merveilleux, plein de qualités, de talents, de dons : il est unique. Chaque accompagnement sera forcément unique.

S’émerveiller de son enfant est la base d’une éducation bienveillante et consciente. L’enfant peut être le guide de son éducation, c’est à dire qu’il emmène ses parents vers sa propre autonomie. Pour le parent, éduquer devient alors plus simple et plus instinctif : il s’agit avant tout de se mettre à l’écoute, de manière active, et de répondre aux besoins de son enfant tout en le laissant responsable et intègre.

Le chemin ne ressemblera sans doute pas du tout à ce que vous imaginiez, il paraitra parfois incompréhensible, voire irrationnel, sans repère aucun, sans vérité solide à laquelle s’accrocher, parsemé d’ « erreurs », mais il sera tellement merveilleux. Un constant rappel à l’essentiel. Encore une fois, ce n’est pas le but qui importe, mais le chemin !

L’émerveillement mène donc à la confiance : quelle chance que d’avoir fait confiance à son enfant, de l’avoir respecté dans son être, de l’avoir accompagné avec cette qualité d’être, et de toujours refaire sa connaissance… Et de nous accompagner nous-mêmes de la sorte.

Ce cheminement fait aussi la part belle à la joie, au plaisir et au désir, c’est à dire à « l’accroissement de l’intensité vitale »[1] : c’est la puissance de la vie qui s’exprime ici, dans toute sa splendeur. Imaginez la saveur de la première pomme croquée, la beauté d’un printemps renaissant, le bonheur et l’enrichissement des relations tissées, ou même l’enthousiasme et la satisfaction lorsque l’on parvient à jouer d’un instrument après s’être longuement entrainé, ou la joie d’avoir compris quelque chose !… 
L’émerveillement est une invitation à prendre le temps, à la contemplation – dans ce monde où tout va trop vite, où l’on ne prend plus la peine de regarder, de sentir… Nous sommes ici pour vivre, nous émerveiller, et créer une existence heureuse.

De cette capacité à s’émerveiller dépend rien de moins que la société de demain et l’avenir de notre monde. Car celui qui s’émerveille se sent aussi responsable d’entretenir la beauté, la bonté, la poésie ; d’y participer et de contribuer au réenchantement du monde.  L’émerveillement est en réalité chose sérieuse, choix d’une intelligence lucide.

Je terminerai par cette sentence de Bachelard :
« Il est des heures dans l’enfance où tout enfant est l’être étonnant, l’être qui réalise l’étonnement d’être. »

Et je vous conseillerai le bel ouvrage de Denis Marquet, Nos enfants sont des merveilles: les clés du bonheur d'éduquer (2012, Ed. du Nil).






[1] MARQUET Denis, 2012, Nos enfants sont des merveilles: les clés du bonheur d'éduquer. Ed. du Nil, p.49

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