"D’une certaine manière, certains des conseils de base de mon
approche de l’éducation sont liés au concept du continuum (cf. le livre The
Continuum Concept, de Jean Liedloff) pour ce qui concerne le lien affectif avec
nos enfants ; la pleine reconnaissance de leur « bonté
fondamentale » (voir les écrits de Chogyam Trungpa Rinpotché) et la
nécessité d’une attention suivie à l’égard des enfants aussi longtemps qu’ils
la recherchent (sachant qu’un enfant élevé d’une manière saine ne sera ni
possessif ni angoissé et cherchera à quitter le cocon familial dès qu’il (ou
elle) est en mesure de se déplacer.
Fondamentalement, il s’agit de créer un environnement
propice à la croissance, totalement dépourvu d’abus tant physiques que
psychiques, de négligences bénignes ou sadiques, d’humiliations – qu’elles
soient verbales, émotionnelles ou autres -, dépourvu de violence et de cruauté.
Autrement dit, hormis les tensions naturelles dues à la maladie, à la
croissance, à l’adaptation sociale, aux élans de créativité, aux crises et
autres demandes intérieures ou essentielles qui se présentent spontanément au
cours de son développement, l’environnement éducatif d’un enfant est conçu pour
être libre de toute pression venant des adultes au sens de la domination ou de
la manipulation (conscientes ou inconscientes).
L’objectif est qu’un enfant grandisse en sachant tacitement
et organiquement, au-delà de tout doute et de toute confusion, qu’il est aimé
de manière absolue, aimé pour ce qu’il est et non pour ce qu’il devrait être en
termes de demandes particulières, de performances, de réussites, voire de
drames.
Il est bien sûr évident que ce n’est pas le cas pour la
grande majorité et, à vrai dire, pour l’immense majorité des hommes et des
femmes de notre époque. Nous-mêmes, notre génération et les générations
précédentes (et peut-être bon nombre de générations précédentes) ne nous
sentons pas aimés de la sorte. Nous nous sentons à la fois tacitement, mais
aussi organiquement, mal aimés, mal appréciés, non accomplis, insatisfaits, vides
et sans valeur. Nous avons été élevés dans l’idée que l’amour est une commodité
accessible moyennant un certain prix, à savoir : « être de bons
petits enfants bien sages », tranquilles, géniaux. Un prix qui pour la
plupart d’entre nous se révélait inabordable.
Alors l’amour – la « chose » - nous était
confisqué, parce que nous ne pouvions satisfaire les demandes insatiables
venant du non-amour de notre communauté d’adultes. J’entends pas
communauté : les parents, la famille élargie, les professeurs, les
baby-sitters et même les inconnus rencontrés à l’épicerie, à qui nos parents
s’empressaient de raconter nos échecs (selon eux), sans tenir le moindre compte
de notre présence et de la honte qui en résultait pour nous.
Alors, ceux qui se sentent concernés par une éducation
consciente tentent d’élever leurs enfants de manière radicalement différente,
dans le but de créer une société de beauté, de joie, de ravissement, d’amour,
de douceur, de gentillesse et de compassion, dans laquelle la confiance en soi,
un bonheur naturel et une volonté forte et ouverte pour avancer dans la vie et
expérimenter avec intérêt et compétence.""
Lee Lozowick, Journal, novembre 1993.
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