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- Les notes prennent en otage les apprentissages
Lorsque nous utilisons les notes
et les contrôles, nous créons une fausse motivation : non pas celle
d’apprendre ou de comprendre, mais de faire le nécessaire pour un examen – ce
nécessaire allant jusqu’à tricher parfois. Il ne restera ensuite que peu de
choses de cet enseignement. Les notes ne reflètent donc aucunement les
connaissances et compétences d’un élève ; elles ne sont donc pas fiables. Qu’il
s’agisse de chiffres, de gommettes, ou encore de couleurs, le problème reste le
même : on utilise toujours une carotte (et un bâton) au lieu d’encourager
l’apprentissage pour l’apprentissage et de favoriser l’enthousiasme naturel des
enfants à apprendre. Qu’il s’agisse d’une « évaluation », celle-ci
est en réalité un contrôle déguisé.
Sur un autre plan, un système
basé sur la notation et le contrôle est donc basé sur le jugement, la
comparaison, le classement et la performance. Cela signifie que ce système est
source de stress, d’angoisse, de dévalorisation, car alors, notre valeur est
donnée par notre note. Durant nos années de scolarisation, notre principale
identité est celle de l’élève, aussi les notes deviennent un repère identitaire
important pour notre entourage. Le bon élève est donc celui qui est bien
soumis, sage, assis sans bouger, et qui récite le mieux ses leçons. Qu’apprend
alors l’enfant ? Que l’estime de soi et l’amour sont soumis à la
reconnaissance, aux attentes et aux conditions des adultes, dans un climat de peur
de l’échec.
Ainsi, engendrant des catégories,
ce système est un facteur de discrimination, de dépendance. On tente
désespérément de chiffrer ce qui n’est pas de l’ordre du quantifiable, dans
cette obsession de maîtrise et de manque de confiance.
Par ailleurs, nous ne pouvons
plus nous permettre de croire aujourd’hui qu’avoir de bonnes notes est suffisant
et garantit d’une « belle vie », de réussite et de carrière
professionnelle. L’école a été créée sur le modèle économique pour répondre à
des impératifs économiques : elle est l’outil d’une idéologie qui
assujettit l’humain et la vie. L’école de l’Etat est en réalité l’école des
dominants - grandes entreprises et des banques, l’école du pouvoir et du profit
à tout prix. L’école est l’instrument privilégié de l’inconscience, de la
déresponsabilisation, de l’obéissance, de la passivité et de l’infantilisation.
Or, aujourd’hui nous prenons conscience de la folie de ce système, de ses
conséquences dramatiques, à tous points de vue : ce système met en danger
notre vie et celle de la planète et des écosystèmes.
- La confiance et l’amour pour guides
Aujourd’hui, nous pouvons tout
simplement quitter ce système de peur, de contrôle et de notes pour enfin faire
confiance, et accompagner nos enfants dans une relation basée sur un tout autre
paradigme : confiance, accompagnement, bienveillance. Il faut sans doute
accepter et respecter que les apprentissages des enfants nous échappent, et que
si nous interférons sans y être invités, nous prenons le risque de les freiner.
Nous pouvons partager leurs découvertes, leur proposer des outils et du
matériel, dans la joie et l’enthousiasme. Apprendre est naturel, nous apprenons
ce dont nous avons besoin lorsque l’occasion se présente, tout simplement.
L’éducation n’a pas besoin de pédagogie, mais de bon sens, de présence,
d’écoute et d’empathie. L’éducation n’a pas besoin de notes, de reconnaissance,
de peur, ni de maîtres. Nous apprenons comme nous respirons. Dans cette
perspective, apprendre est une joie, un accomplissement, en plus d’être utile,
pour construire un monde meilleur. On récolte ce que l’on sème…
« Il est à la fois vrai et trompeur de dire que les enfants veulent
apprendre. Oui, ils veulent apprendre, mais de la même manière qu’ils veulent
respirer. »
John Holt
Bonjour,
RépondreSupprimerje suis d'accord avec vous sur l'inutilité des notes pour les enfants et leur apprentissage, je ne sais pas comment je pourrais gérer dans mon travail, que tous les salariés de mon service soient notés chaque semaine, et l'effet malsain que cela engendrerait.
Cependant, je pense que la note est utile pour l'enseignant qui a besoin de savoir ou en est l'enfant dans son apprentissage, sans système de notation et d'évaluation comment pourrait-il aider chaque enfant dans son apprentissage propre ?
D'autre part, je ne comprend pas du tout le rapport et le raisonnement de cette phrase : "L’école de l’Etat est en réalité l’école des dominants - grandes entreprises et des banques, l’école du pouvoir et du profit à tout prix".
Ce sont les grandes entreprises qui décident des pédagogies utilisées en classe ? le but est la consommation ? je ne comprends pas vos propos...
Quelle position adopter face à un enfant qui refuse les apprentissages proposés, selon vous il faut l'accompagner, mais s'il refuse tout ce qui lui est proposé on fait quoi ?
Bonjour Anonyme,
SupprimerC'est l'Etat qui éduque nos enfants, lorsqu'ils sont scolarisés, à travers l'E.N.
Il est important aujourd'hui de réfléchir à ce qu'est l'Etat, à sa légitimité, et au service de qui il est. Certainement pas au service des citoyens et encore moins des enfants, mais bien au service de l'économie - et qui est à la base de cette économie? Les multinationales et les banques.
Je me permets de vous renvoyer aux ouvrages de Charles Caouette, de John Holt, de Ivan Illich, ou encore de Pierre Demers. Ce dernier en particulier, analyse l'interpénétration du système économique au sein de l'état et de l'école, avec les conséquences que cela engendre.
Il me semble crucial de réfléchir à QUI vous confiez vos enfants, et ce qu'on leur apprend, consciemment ou non. On ne peut plus, aujourd'hui, fermer les yeux et laisser l'éducation de nos enfants sans se poser de questions : c'est notre responsabilité et notre devoir de parent.
La note légitime certainement le travail de l'enseignant (d'autant plus qu'elle le rassurer), et de l'école, mais elle n'est absolument pas nécessaire, comme je l'écris dans cet article. Elle instaure un climat de jugement, de stress, entre autres. Je propose de changer de paradigme, ainsi donc, si nous souhaitons une relation de confiance, il n'y a vraiment plus besoin de contrôler. Nous avons de vieilles habitudes qui sont profondément ancrées, et je comprends bien les résistances qui peuvent se dresser face à de tels propos. Mais lorsque nous déconstruisons, à coup de "pourquoi" les raisons qui légitiment la note et le contrôle, nous comprenons bien qu'à la racine, nous ne trouvons que de la domination, de la peur, et un manque de confiance.
En ce qui concerne un enfant qui refuse les apprentissages, et bien justement, c'est bien là l'une des dérives du système: en forçant les apprentissages, on en arrive malheureusement à dégouter, à freiner, à bloquer l'apprentissage naturel. Idéalement, cesser d'être dans l'attente, et d'ajouter de la pression, mais choisir la bienveillance, l'accueil, le respect. Et surtout, prendre le temps, le temps de ce rejet, et aussi le temps de se reconstruire après cette rupture. Et peut-être alors envisager ensemble une autre voie d'éducation.