Michel Fize, sociologue au CNRS
et spécialiste de la jeunesse, auteur du Bac inutile, (L'Oeuvre éditions, avril
2012)
Notre sondage dévoile que 80% des
Français sont opposés à la suppression des notes. Le sociologue Michel Fize
décrypte pour Metro cet attachement à un système qui, selon lui, est
inefficace.
Comment expliquez-vous
l'attachement des Français aux notes ?
Quand il d'agit de scolarité, les
parents ne sont attachés qu'à une seule chose : à la réussite de leur enfant.
L'épanouissement, la préparation du futur adulte qu'il sera, les parents le
relèguent bien souvent au deuxième rang, car ils sont happés par l'exigence de
réussite. La note leur permet ainsi de savoir, en un coup d'oeil, où se situe
son enfant dans chaque matière. Et donc de corriger le tir : il va valoriser la
bonne note et stigmatiser la mauvaise. Quand l'enfant a 18/20, c'est bon, quand
il a 4/20, ce n'est pas bon. C'est clair, et tout le monde le comprend ainsi.
Et ce n'est pas un bon système ?
Non.
Il faut comprendre que si l'école doit évaluer les compétences des enfants,
elle n'a pas pour vocation de les meurtrir. Or une mauvaise note est
décourageante, frustrante, démotivante. Elle ne pousse pas l'élève. Au
contraire. Elle crée un système de compétition, de classement, qui n'a
absolument pas sa place à l'école primaire, ni même au collège, où il s'agit
d'apprendre les bases. La notation n'a alors aucune utilité. Elle est au
contraire un obstacle pour ceux qui sont en bas de l'échelle.
Les notes rendent-elles les
élèves malheureux ?
C'est une évidence. D'une façon générale, les élèves ne
sont pas heureux à l'école. Là où ils se réjouissent d'y aller, c'est pour une
raison qui n'a rien à voir avec salle de classe, mais pour son côté convivial,
avec les copains. Le mal être des élèves français est à relier à la lourdeur
des programmes, aux exigences des professeurs, à la crainte de ne pas être à la
hauteur. Ce sentiment est amplifié par les notes.
Comment améliorer ce système de
notation ?
Il faudrait retarder le plus longtemps possible la notation, comme
en Suède, où elle démarre au lycée. Il faut ainsi remplacer le principe de
notation par celui d'évaluation. Et supprimer la compétition, qui stresse les
élèves. Le système de notation par les lettres (A, B, C...), comme par les
chiffres, conduit inévitablement à un classement. Il faudrait donc, comme en
Suède à nouveau, que les professeurs évaluent le parcours de l'élève dans un
rapport qui met en avant ce qu'il sait faire, ses compétences et valorise ses
efforts et progrès. Et qui indique bien ce qui lui reste à faire.
Source : Metro France, 02/09/12.
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