"Tree of life", par Carol Ballenger |
La pensée complexe, la moins
mauvaise approche du Vivant ?
mardi 23 mars 2010, par Muriel Briancon
Extraits
« Penser complexe » et
« faire multiréférentiel et pluriel » sont respectivement le
paradigme et la méthodologie les plus adaptés pour appréhender les phénomènes
vivants c'est-à-dire complexes, auto-éco-organisés et orientés vers l'autonomie.
Remède à la vision réductrice, la pensée complexe permet en effet de développer
une vision pertinente du Vivant car elle est notamment multidimensionnelle et
dialogique. Une approche multiréférentielle et une méthodologie plurielle sont
alors les outils les mieux à même d'appréhender les caractéristiques des objets
de recherche que se donnent les sciences humaines. Mais en dernier ressort,
l'essence des phénomènes vivants reste inaccessible à la pensée humaine. Cette
conscience de l'inachèvement, la pensée complexe l'intègre avec bonheur.
(…)
Approcher le Vivant nécessite une
pensée complexe
Face à un paradigme occidental
excessivement rationalisant, fragmenté et figé, la pensée complexe apporte un
bol d'oxygène en offrant à l'intelligence une ouverture salutaire pour mieux
comprendre les phénomènes vivants. Lorsque Edgar Morin souligne que
« l'intelligence parcellaire, compartimentée, mécanistique, disjonctive,
réductionniste brise le complexe du monde en fragments disjoints, fractionne
les problèmes, sépare ce qui est relié, unidimensionnalise le
multidimensionnel. C'est une intelligence […] myope […] ; elle finit le
plus souvent par être aveugle » (Morin, 1993, p. 187), il montre combien
la pensée occidentale est la malheureuse héritière d'un XVIIème siècle cartésien
et rationaliste à l'excès, d'un XIXème siècle positiviste et disciplinaire, et
d'un XXème siècle tragiquement barbare car prisonnier de ses certitudes
scientifiques. Le XXIème siècle verra-t-il l'avènement d'une pensée plus
élaborée et plus apte à respecter les phénomènes vivants ? Ceux-ci sont
notamment multidimensionnels, dialogiques et animés d'une énergie inépuisable.
(…)
La pensée complexe réintroduit en
effet de la dialogie dans une pensée occidentale très marquée par un héritage
parménidien qui exclut depuis 2500 ans le non-être. En réintroduisant un peu de
relativité héraclitéenne, la perception du Vivant acquiert une nouvelle
profondeur. Ce qui est et ce qui n'est pas ne sont jamais très éloignés. Un
constant va-et-vient entre les deux est nécessaire pour saisir les paradoxes
inhérents aux phénomènes vivants.
(…)
Dans notre exemple, le désir de
savoir est au carrefour de multiples couples antagonistes : social /
individuel, inconscient / conscient, destruction / création, transgression /
adaptation, nostalgique / prospectif etc… Tout à la fois fort et fragile,
puissant et vacillant, ouvert et fermé, le désir de savoir est toujours en
mouvement, dynamique, contradictoire, opaque, animé d'une énergie inépuisable,
insaisissable et irréductible, et en fin de compte profondément vivant. On peut
même dire que le désir de savoir est « hyper-vivant » distinguant
l'homo sapiens de l'animal et lui insufflant l'ivresse de savoir, parfois même
jusqu'à la déraison (Morin, 1994, p. 160). Cette énergie transparaît surtout
dans le débat collectif et dans les entretiens semi-directifs : un même
élève peut tour à tour exprimer une intense pulsion de savoir inconsciente et
transgressive et un aussi intense refus de savoir social et scolaire par
exemple. Au cours du débat ou des entretiens, son désir de savoir s'exprime,
évolue, change de polarité, se nuance ou se transforme.
(…)
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