lundi 15 octobre 2012

Prendre conscience de son corps



Aujourd’hui, nombre d’enfants doivent concevoir des abstractions très tôt. On veut apprendre plus et plus vite, et certains apprentissages commencent à la maternelle, alors qu’autrefois, ils étaient seulement abordés à l’entrée en primaire, tandis que le jardin d’enfant était consacré au jeu.

Or, cet instant de la vie est avant tout une phase essentielle du développement du schéma et de la perception corporels : un vécu tout en sensorialité. Nous remarquons combien les jeunes enfants expérimentent avec tout leur corps : ils jouent, portent à la bouche, prennent, rejettent, se jettent sur le canapé ou le lit, explorent avec les mains, les pieds, se frottent, poussent de leur corps,…

Un enfant qui n’a pas eu le temps ou la possibilité de réaliser cette construction risque de n’avoir pas assez investi son corps. Il n’a pas suffisamment fait l’expérience des limites de son corps, n’est pas assez « ancré » dans celui-ci, et sera peut être peu conscient de son corps. De tels enfants deviennent généralement maladroits (ils se cognent pas exemple souvent, ne mesurent pas les distances, etc.), manquent d’équilibre, et montrent un manque important de sécurité, de confiance en eux.

Pour combler ses besoins affectifs et physiques, le nouveau-né peut être porté longuement, massé, touché, caressé, et dormir contre ses parents. Cette phase fusionnelle est essentielle, elle lui permet de sentir tout son corps, d’en appréhender peu à peu les limites et en même temps d’être nourri sur le plan affectif. L’accouchement est d’ailleurs l’expérience physique la plus intense que connaît l’enfant – les enfants nés par césarienne ont besoin de combler par la suite cette carence par plus de contacts par exemple.

L’enfant plus grand peut tout aussi bien être massé et porté. De plus, une multitude d’expérimentations physiques pourront l’aider à prendre conscience de son corps, à en faire l’expérience.

Parmi ceux-ci, on trouvera bien évidemment les exercices physiques, la brain gym, les gymnastiques douces,  les arts martiaux, le yoga,… 

Mais aussi des expériences telles que :
- la piscine remplie de balles, de marrons,
- un bain de pieds dans une bassine remplie de billes,
- jouer dans le sable ou dans la terre,
- pétrir et modeler de l’argile,
- pétrir la pâte à pain,
- et faire l’expérience de matières différentes...

On peut également apporter un soin particulier aux matières qui entourent l’enfant, dans son environnement, mais aussi celles qui composent ses vêtements. Ainsi, choisir des matières nobles, naturelles, douces, aideront l’enfant à vivre des expériences positives. 
Il est nécessaire de laisser l'enfant livre de vivre toutes sortes d'expériences tactiles, chaque jour.

Il ne semble pas nécessaire de proposer à l’enfant des « kits » de sensorialité. D’une part parce que la vie ne se range pas en petites boîtes, chose assez artificielle somme toute. D’autre part, parce que l’environnement actuel est suffisamment riche de sensorialité. Bien sûr, si on le souhaite vraiment, on peut toujours fabriquer soi-même des plateaux tactiles, des boîtes sensorielles.

En tous les cas, il semble important de laisser l’enfant faire ses expériences, de ne pas forcer les apprentissages, de ne pas intervenir ; le jeu libre offre cette perspective. L’enfant qui fait l’expérience par lui-même, en toute liberté, la vit pleinement, vraiment, parce qu’il est prêt. Par contre, s’il n’a pas cet élan et qu’on lui propose un plateau, il fera certes l’exercice, mais il est possible qu’il n’intègre pas pleinement l’expérience. Le rôle de l’adulte consiste à mettre en place un environnement riche et épanouissant, de répondre aux demandes de l’enfant. Un rôle d’accompagnant donc.

Ainsi, les études confirment que le sens du toucher, l'expérience sont essentiels, et permettent ultérieurement de développer d'autres capacités, comme le langage. Cela permet aussi d'être bien dans son corps, et par ce biais, favorise un bon équilibre (aux sens propre et figuré), un bon développement des sens, et donc la découverte du monde, mais aussi la rencontre et la communication avec les autres. Et enfin, cela favorise l'autonomie et la confiance en soi. 

Bibliographie :
Wolfgang Auer, Mondes sensibles : Développer les sens – Cultiver la perception – Apprendre avec joie. 2009. Ed. Aethera.
Joan Sala et Aloka Marti. Eveil de la conscience par le corps : Pédagogie et exercices pour des enfants épanouis. 2008. Ed. du Souffle d’Or. 29,90€

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