samedi 5 janvier 2013

Célestin Freinet: Pédagogie et émancipation (livre)



"Lorsqu'on nous demande : Quelle est la ligne de notre Mouvement ?, nous devrions sans doute répondre : nous sommes le mouvement qui déplace les lignes." Formule de Freinet longtemps en exergue de la revue L'Éducateur.

Henri Peyronie, Célestin Freinet: Pédagogie et émancipation. 1999. Ed. Hachette 


Lorsqu'on parle de pédagogie coopérative, c'est Célestin Freinet qu'on présente comme figure de proue. Freinet, gravement blessé aux poumons lors de guerre de 1914-1918, a donné les raisons qui l'ont à l'origine poussé à une pratique dans laquelle, l'enseignant ne tient pas la première place dans la relation pédagogique, mais remplit le rôle du facilitateur, du médiateur, de celui qui organise les conditions favorables à l'apprentissage. Dans cette démarche, c'est l'apprenant qui devient le centre du processus d'apprentissage.

Freinet raconte :
"Quand je suis revenu de la guerre 14-18, j'avais été assez sérieusement blessé et, notamment, je ne pouvais pas parler longtemps, surtout pas dans une salle de classe. Lorsque vous êtes en train d'expliquer quelque chose : "Tu vois, mon petit, ça c'est…", un gosse laisse tomber un crayon, donc il vous interrompt. Vous reprenez le fil et puis il y en a un autre qui fait taper sa table. "Ah ! tu n'as pas fini de nous embêter ?" Alors on reprend et c'est un autre encore (...) Bien souvent, ils le font même exprès de trouver une occasion pour un peu se dégourdir les jambes et les bras. Lorsque j'avais parlé pendant dix minutes, un quart d'heure, comme cela je n'en pouvais plus. Et alors, j'ai cherché des solutions : ou bien je quittais l'enseignement à ce moment-là, ou bien je trouvais d'autres techniques de travail qui m'auraient permis de faire ma classe de façon intelligente, efficiente aussi, de m'intéresser à ma classe mais que je puisse tenir le coup. Alors j'ai cherché."

À ces raisons pratiques s'ajoute un engagement militant. En 1944, Freinet fonde l'École Moderne française. Ses innovations pédagogiques ne sont acceptées qu'à la marge, le système éducatif français les rejette et empêche leur diffusion. Freinet va donc, d'une part, ouvrir une école privée, d'autre part, constituer un mouvement pédagogique, connu sous le nom d'Institut Coopératif d'École Moderne (I.C.E.M) qui est intégré dans la Fédération Internationale des Mouvements de l'École Moderne (F.I.M.E.M). Une vaste littérature couvre les avancées, les techniques et la vie de ce mouvement pédagogique. Il faut ajouter que les pratiques Freinet ne font pas seulement partie de l'histoire des idées et des pratiques pédagogiques. Actuellement, de nombreux enseignants et un certains nombre d'établissements se réclament de Freinet ou de l'École Moderne. Les sites Internet de ces écoles donnent une nouvelle diffusion à leurs idées.

Freinet a développé toute une série de techniques que les adhérents du mouvement pratiquent de façon cohérente et intégrée, mais que l'on peut observer, parfois détachées de leurs fondements philosophiques et politiques, dans les classes ou des écoles, qui ne prétendent pas pratiques une pédagogie Freinet et parfois ne savent même pas d'où viennent ces techniques. On peut évoquer le conseil de classe (au début nommé " conseil de coopérative", le " Quoi de neuf ? " ou la causette (moment de parole), un fonctionnement par ateliers, un " plan de travail " ou " contrat de semaine", la fabrication du journal, l'imprimerie, la radio à l'école, la correspondance scolaire.

Chez Freinet, toutes ces techniques sont reliées les unes aux autres dans une organisation globale cohérente de la classe. Le développement de cette pédagogie est fortement marqué par le contexte historique et supporté par une idéologie empreinte d'une vision du travail non aliénant ou robotisant mais vivant et émancipateur, fortement inspirée par le courant marxiste. "C'est la pédagogie d'en bas" dit Freinet. C'est une pédagogie centrée sur l'enfant comme membre d'une communauté éducative.

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