Le Village des Plateaux est une
structure d’accueil d’enfants en difficulté scolaire. Sa fondatrice, Christine
Paturel, était auparavant enseignante et directrice d’école dans l’Enseignement
catholique. Elle a décidé, à l’âge de la retraite, d’accueillir avec son mari
des enfants en difficulté scolaire. Depuis 2001, elle a fait de leur domicile
une maison d’accueil. C’est une école hors contrat, sous forme associative, qui
fonctionne grâce à une quarantaine de personnes bénévoles. L’objectif est de
permettre à des enfants, perturbés psychologiquement et affectivement, de
trouver un équilibre qui leur permette de réintégrer un cursus scolaire normal.
Cette école accueille actuellement 24 enfants : 10 en primaire, 12 en
collège et 2 en terminale. Depuis sa création, cette école a ainsi assuré la
réinsertion de plus de 90 enfants.
Une interview de Christine
Paturel, fondatrice de cette ferme école pour le blog de la Liberté Scolaire.
Le blog de la liberté scolaire : Voilà 10 ans que vous avez fondé le
village des plateaux. Quel était votre souhait alors que vous quittiez une vie
professionnelle de directrice d’école de l’Enseignement catholique sous contrat
?
Christine Paturel : J’ai tellement vu dans ma carrière de jeunes
ayant des capacités intellectuelles, mis à l’écart ou orientés dans des
institutions spécialisées, telles que les IME ou IMP, tout simplement parce que
le système scolaire qui leur était proposé ne leur convenait pas ! L’on a
vite fait de poser des jugements ou de mettre des étiquettes sur des enfants en
échec scolaire qui ne correspondent pas à la norme ou ne sont pas sur des
rails. J’ai tellement souffert de cet état que j’avais dit que
lorsque je serais à la retraite, je monterai une structure qui permettrait à
des jeunes de reprendre confiance en eux et en m’adaptant à eux et non eux à
moi. Et c’est ce que nous avons fait avec mon mari en ouvrant notre
maison et en accueillant des jeunes en échec scolaire. Depuis 10 ans, 94 jeunes
sont repartis vers un avenir serein. Nous avons surtout accueilli des
jeunes de familles peu aisées et qui ne savaient pas ce que voulait dire
« aimer ».
Vous avez su mobiliser de nombreux bénévoles autour de vous. Beaucoup
d’entre eux apportent non seulement leur bonne volonté mais aussi des
compétences éducatives. Comment avez-vous constitué cette équipe éducative ?
Je crois que pour motiver des
personnes à venir partager un projet comme le nôtre, il faut rester soi-même,
être simple, et surtout être authentique. Il faut croire à ce que l’on fait et
aimer partager. Avoir beaucoup d’enthousiasme, être avec les personnes, montrer
l’exemple, dynamiser son équipe, leur faire confiance, leur dire et leur
montrer qu’on a besoin d’eux. Les gens ne se trompent pas sur les
intentions de celui qui demande. On est heureux quand on vient vous demander
quelque chose, on est heureux que l’on ait besoin de nous, c’est
valorisant. Ainsi, petit à petit, nous avons eu beaucoup de bénévoles et pu constituer
une équipe.
Vous « remettez sur les rails » les enfants qui vous sont confiés. Sur
quelle pédagogie originale vous appuyez-vous ?
Nous n’avons pas une pédagogie
très originale mais nous essayons surtout de connaître chacun et de nous
adapter à lui. Nous pratiquons beaucoup la « pédagogie de la réussite,
encourageant le jeune dans tout ce qu’il fait, en lui donnant la
possibilité de se tromper, en croyant en lui, en valorisant ses réussites, en
créant un climat de confiance, de chaleur, de joie, de patience, en
reconnaissant l’enfant tel qu’il est, en favorisant sa créativité, en
s’adaptant à son rythme, en pratiquant des activités transversales :
musique, théâtre, jardinage, élevage, peinture, cuisine, couture, sport.
En réalité, pour aider les
jeunes à sortir de leur échec, nous n’avons pas de recette mais nous avons une
clé, la seule capable d’ouvrir toutes les portes, c’est la clé de l’Amour, non
l’amour qui vient de nous mais l’Amour qui coule en nous, l’Amour par lequel
nous existons. C’est la seule clé qui permet de dépasser leurs peurs et leurs
échecs. Les programmes pédagogiques sont les mêmes que ceux de l’Education
Nationale mais ils sont transversaux et investissent les jeunes dans la
découverte des cycles du vivant. Ils leur enseignent que tout est relié.
Nous nous inspirons de Freinet, Montessori, Lagaranderie mais tout est
personnalisé en fonction de chacun.
Vous venez d’inaugurer la « ferme école du Village des plateaux ».
Pourquoi cette dénomination ?
Avant tout, le village des
Plateaux voudrait être un village solidaire où jeunes et ainés se côtoient et
s’apportent mutuellement. Et pour poursuivre le projet, ça serait un quartier
pour les ainés, un quartier pour les adultes eux aussi blessés par la vie.
Pourquoi la « ferme
école » ? Nous pensons que la ferme est un lieu d’ancrage privilégié
avec la réalité. Replacer au cœur d’un lieu vivant les apprentissages
théoriques et pratiques offre aux jeunes de s’épanouir pleinement. La ferme
propose le développement en parallèle « de la tête, des mains et du
cœur ». Des ateliers quotidiens permettent l’acquisition de compétences
manuelles et artisanales qui contribuent efficacement au développement du
cerveau. Puis, c’est dans la participation à un projet que le jeune
apprend à être responsable. Et, investir le jeune de responsabilités est le
seul moyen de lui redonner le sens de l’effort. Outre la confiance en soi, la
présence d’animaux apprend aux jeunes à gérer ses émotions.
L’animal est le point d’appui idéal pour établir un nouveau mode de
relation avec l’adulte.
A travers une pédagogie active
fondée sur la confiance en lien avec la nature, les jeunes se reconstruisent.
Et c’est bien l’école de la vie, une vie d’école au sein d’une ferme.
Le site de la ferme école : http://villagedesplateaux.voila.net
Le jardin potager du Village des Plateaux |
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