Un plaidoyer contre l’éducation auti-autoritaire et toute
autre forme d’éducation
Traduit par Yves Bonnardel
"Beaucoup d’adultes croient aujourd’hui que l’idée de
relations plus libres avec les enfants a “malheureusement” fait faillite. La
tentative de laisser grandir les enfants sans interdits ni punitions aurait
donné des humains désorientés ou même égoïstes, asociaux, qui n’arrivent pas à
se débrouiller avec leur propre vie. Et avant tout, la pratique de la vie
commune entre parents et enfants aurait montré qu’on ne s’en sort pas sans
autorité éducative. Je pense avoir décelé là une faute de raisonnement. Une
thèse fondamentale de cette contribution est que l’éducation anti-autoritaire
n’a pas fait faillite à cause des comportements anti-autoritaires, mais parce
qu’on a gardé l’idée qu’il faut continuer à éduquer les enfants. (…)
De l'échec de l'éducation anti-autoritaire, des conclusions
fausses ont été tirées. Aujourd'hui, une éducation plus logique et plus
autoritaire est de nouveau exigée, parce que l'alternative n'est pas perçue :
mettre un point final à l'éducation et développer des relations égalitaires
avec les jeunes personnes. De ce fait, le débat sur les valeurs éducatives
donne lieu à de nombreuses absurdités. Ainsi on essaie de faire éclore des
valeurs démocratiques par des moyens (l’éducation) non démocratiques, malgré le
fait que cette tentative aussi est condamnée à l'échec par ses contradictions
internes. Pourtant, c’est si simple : les valeurs démocratiques, lorsqu’elles
sont vécues, n’ont besoin d’être prêchées ni même enseignées. Ce n’est pas par
l'éducation qu’on obtient que des personnes intègrent les valeurs démocratiques
et les considèrent importantes.
S’il arrive qu’un élève intègre ces valeurs, ce n’est pas
imputable à l'éducation, mais aux expériences que la personne a fait en dehors
de l'éducation. Par l'éducation, on atteint plutôt le contraire : car la
sympathie à l'égard des valeurs se réduit comme peau de chagrin si elles nous
sont continuellement prêchées et qu’on essaye de nous les enseigner. [...] Pour
que l'éducation fonctionne, son objectif doit avoir même contenu que ses moyens
(c’est-à-dire qu’ils doivent être aussi non démocratiques). Qui a des buts
démocratiques, doit aussi trouver les moyens démocratiques de les réaliser. Il
doit faire ses adieux à l'éducation."
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