C’est une expérience qui rappelle le scénario du film « Les
dieux sont tombés sur la tête », dans lequel une bouteille de
Coca, jetée d’un avion, atterrit dans un village bushmen et chamboule le
quotidien de ses habitants.
Sauf qu’avec l’opération menée par One Laptop
Per Child (OLPC) auprès d’enfants éthiopiens analphabètes, ce sont
nos certitudes occidentales sur l’apprentissage qui pourraient bien être
bousculées.
L’ONG livre depuis 2005 du
matériel informatique simple et robuste dans les pays pauvres, et indique avoir
déjà distribué 2,5 millions d’ordinateurs portables de type XO dans quarante pays. Son
fondateur a exposé sa démarche
lors de la conférence EmTech,
organisée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT), à Cambridge fin
octobre.
Nicholas Negroponte et son équipe
sont partis d’un constat : parmi les 100 millions d’enfants qui n’ont
accès à aucune éducation, beaucoup se trouvent dans des zones isolées, dans
lesquelles aucun adulte autour d’eux ne sait lire et ne peut donc les aider.
Mais peuvent-ils apprendre tout seul ?
Pour le savoir, l’organisation a
livré des tablettes pré-équipées à une quarantaine d’enfants dans deux villages
éthiopiens, Wonchi et Wolonchete, à une centaine de kilomètres d’Addis Abeda.
Alimentées grâce à un panneau
solaire, elles contenaient une collection de plusieurs centaines
d’applications, de jeux, de livres, de dessins animés et de films (en anglais),
mais n’étaient accompagnées d’aucune instruction, ni d’aucun manuel. Des
données sur leur utilisation étaient enregistrées dans une carte SIM, changée
chaque semaine.
« Je pensais que les enfants
commenceraient par jouer avec les cartons », raconte Negroponte. Mais les
cobayes ont très vite apprivoisé leur nouvel outil :
« Après quelques minutes,
ils avaient déballé et mis en route les tablettes. Après une semaine, chaque
enfant utilisait en moyenne 47 applications par jour. Après deux semaines,
ils utilisaient les jeux destinés à l’apprentissage des lettres pour se mesurer
les uns aux autres, et le village chantait les chansons sur l’alphabet. »
« Ils ont débloqué l’accès à
la caméra »
Quelques mois plus tard, les
tablettes étaient toujours fréquemment utilisées, et certains enfants
commençaient à écrire des mots. Ils avaient tous personnalisé leur tablette, et
même fait leur débuts de pirate informatique :
« Un imbécile chez nous
avait bloqué l’accès à la caméra, alors ils ont “hacké” Android [le système
d’exploitation installé sur la tablette, ndlr] pour l’activer à nouveau. »
Ce qui a ravi Negroponte :
« C’est exactement ce genre
de créativité, de curiosité et de goût pour l’enquête que nous considérons
indispensables à l’apprentissage. »
Ces résultats impressionnants
doivent être confirmés par d’autres expériences du même type, mais ils
pourraient changer la façon dont One Laptop Per Child conçoit son action.
L’organisation s’appuie jusqu’ici sur les écoles existantes, sans toucher les
enfants totalement privés de scolarité :
« Ça pourra leur prendre six
mois, dix-huit mois, deux ans, mais est-ce qu’ils vont réussir à apprendre à
lire, vraiment ?
S’ils peuvent apprendre à lire
tout seul, ensuite ils peuvent apprendre en lisant. Pourrait-on leur donner un
outil pour ça, sans avoir à construire des écoles, embaucher des professeurs,
fournir des manuels ? »
Quand l’école tue la curiosité
Mais pour Negroponte, les pays
développés ont aussi des leçons à tirer de cette expérience :
« Des enfants parviennent à
apprendre à lire sans aller à l’école en Ethiopie, tandis qu’à New York,
d’autres n’arrivent pas à ce niveau alors qu’ils vont à l’école. Que faut-il en
conclure ? »
La facilité avec laquelle les
jeunes, quelle que soit leur culture d’origine, s’approprient les tablettes,
encourage selon lui à repenser les méthodes d’enseignement
traditionnelles :
« Les enfants peuvent
beaucoup apprendre par eux-mêmes, davantage que ce que nous imaginons. Les
enfants sont naturellement curieux, et cette curiosité reste intacte si on ne
la décourage pas, ce qui est souvent le cas à l’école.
Avoir accès à des bibliothèques
contenant des manuels ou des encyclopédies est une bonne chose. Mais c’est
peut-être moins important que de concevoir un monde dans lequel les idées se
forment, se révèlent et se réinventent, au sein d’un apprentissage fondé sur
l’action et la découverte. »
Hé oui, nous sommes des gens curieux avec une envie naturelle d'apprendre ! Les pédagogies, aussi belles soient-elles, ont toutes en commun de nous diriger dans un processus éducatif... En vérité, c'est dans la liberté de la découverte qu'on apprend vraiment !
RépondreSupprimerMerci pour ce bel article inspirant !
Merci chère Fleur de Paix!
SupprimerEt oui: nos enfants apprennent comme ils respirent... Alors, dans la liberté, sans contrainte, ils continuent à vivre ce processus tout naturellement :)
Belle journée!
Merci pour ce chouette article !
RépondreSupprimerLes enfants ont besoin ... d'explorer autre chose que des polycopiés !!
Oui effectivement!
SupprimerMerci Vanessa!
A bientôt! :)